Après l'annonce de la suppression de 15 000 contrats de jeunes volontaires en service civique, c’est la la sidération dans le monde associatif …
En 2025, 72 000 missions d'intérêt général seront confiées à des jeunes, au lieu des 87 000 prévues. Une décision critiquée, d'autant qu'elle affecte les services publics et les associations qui devaient en bénéficier.
Extrait d’un article publié dans le journal Le Monde le 26 juin 2025 :
Les associations, ministères et organismes publics sauront à compter du vendredi 27 juin combien de contrats de services civiques ils vont perdre en cette année 2025. La conséquence d'une décision annoncée, jeudi 19 juin, par le ministère des sports, de la jeunesse et de la vie associative : 15 000 missions vont être supprimées. Au lieu de 87 000, ce sont 72 000 contrats qui pourront être signés avec des jeunes de 16 à 25 ans (et jusqu'à 30 ans en cas de handicap), pour des missions d'intérêt général de six à douze mois, indemnisées 620 euros par mois.
Cette baisse de 17 % résulte d'un gel de crédits, qui a touché de nombreux domaines en avril. Le ministère n'a pas obtenu de Matignon le dégel escompté pour ce dispositif phare, qui a fêté en mars ses quinze années d'existence.
« Jamais l'utilité du service civique n'a été autant reconnue dans les discours publics, mais, entre les mots et les actes, il y a désormais un gouffre », réagit Mickaël Huet, délégué général du Mouvement associatif et porte-parole de la Plateforme inter associative pour le service civique, qui s'est fortement mobilisée ces dernières semaines.
« C'est hyperviolent, regrette Nathalie Hanet, directrice générale d'Unis-Cité, l'association pionnière du service civique. Alors que l'actualité montre combien la jeunesse est fragilisée, le gouvernement la pénalise doublement : 15 000 jeunes vont être privés d'effectuer une mission, et des milliers d'élèves vont être privés de leurs actions de prévention sur la santé mentale, d'éducation à l'image, de sensibilisation au sport ou à l'environnement, d'aide aux devoirs… »
Maire divers gauche de Termes-d'Armagnac (Gers), Thibault Renaudin se dit « sidéré » : « Ce dispositif, c'est la meilleure politique jeunesse qu'on ait eue depuis des décennies. Il permet aux volontaires de s'épanouir dans l'engagement et de se pré-professionnaliser. Il est utile sur tous les types de territoires. » Lui-même préside l'association InSite, qui accompagne des collectivités et des associations rurales pour faire venir des jeunes en service civique, sur des missions allant de la valorisation du patrimoine ou de la biodiversité au recueil de la mémoire des villages, en passant par la solidarité, le renforcement des liens sociaux et intergénérationnels. « En cinq ans, près d'un cinquième des jeunes sont restés travailler sur place, et 30 d'entre eux ont été embauchés sur des postes prolongeant leur volontariat », met-il en avant.
La déception est d'autant plus forte que le service civique connaît un succès croissant. « En 2024, nous avions eu plus de demandes émanant de jeunes et d'associations que de contrats financés. Et on nous annonce que ça va être bien pire cette année, deux mois avant la rentrée, où devaient débuter de nombreux services civiques », relève Franck Présumey, délégué général de la Ligue de l'enseignement, une confédération dont l'intermédiation permet à des milliers de petites associations d'accueillir un jeune en service civique.
« Cela va décourager les bénévoles au contact des services civiques, et cela va peser aussi à plus long terme sur les associations, puisque moins de jeunes pourront les découvrir et s'y engager après leur service civique », prévient Sandrine Pellenz, déléguée générale de la fédération de Moselle. Et de citer le festival international du film d'animation de Metz, fondé bénévolement par d'anciens volontaires en service civique, qui a rassemblé 3 000 spectateurs lors de sa cinquième édition, en février.
Selon la Plateforme inter associative pour le service civique (PISC), les réductions annoncées vont favoriser la sélection, réduisant les opportunités pour les jeunes non-diplômés, en situation de handicap ou qui vivent dans les quartiers prioritaires de la politique de la ville. Elles vont aussi fragiliser des associations déjà confrontées à des baisses de subventions et des appels d'offres de l'Etat et des collectivités, ainsi qu'au ralentissement du mécénat d'entreprises. Des suppressions d'emplois sont à craindre dans celles qui assurent l'encadrement et la formation d'un grand nombre de services civiques.
Le ministère précise au Monde « avoir fait en sorte de préserver au maximum le monde associatif ». Celui-ci va perdre 3 700 missions, soit une baisse de 12 % par rapport à 2024, tandis que le service public s'en voit supprimer 11 300, en baisse de 38 %, et même de 50 % au sein du ministère de l'éducation nationale.
Qu'en sera-t-il en 2026 ? « Nous souhaitons préserver les ambitions [sur le service civique] », a assuré la ministre Marie Barsacq, interpellée par une jeune salariée d'Unis-Cité lors de la célébration du premier anniversaire du service civique écologique, mercredi 18 juin.